Olivier Husson a soutenu son Habilitation à Diriger des Recherches mercredi 14 décembre 2022

Re-conception des systèmes de culture et pilotage des pratiques pour une protection agroécologique des cultures par maintien dynamique des équilibres Eh (potentiel redox)-pH dans les systèmes sols-plantes-microorganismes. Vers une approche systémique et holistique de la "santé unique".

INP Toulouse / Ecole Doctorale SEVAB (Sciences Ecologiques, Vétérinaires, Agronomiques Bioingénieries)

Jury composé de :

  • Jean-Pierre SARTHOU Professeur INP-Toulouse/CNRS, Examinateur et référent HDR
  • Cornelia RUMPEL Directrice de Recherche CNRS, Rapporteuse
  • Lionel RANJARD Directeur de recherche INRAe, Rapporteur
  • Muriel VALANTIN-MORISON Directrice de Recherche INRAe, Rapporteuse
  • Lionel JORDAN-MEILLE Maître de Conférence Bordeaux Sciences Agro/INRAe, Examinateur
  • Michel DURU, Directeur de recherches INRAE, Examinateur

Résumé

Mon parcours depuis 35 ans est fait de boucles multiples : boucles géographiques qui m’ont permis d’appréhender une grande diversité de situations agroécologiques et socio-économiques (Afrique de l’Ouest, Vietnam, Madagascar) ; boucles entre recherche fondamentale, recherche appliquée, formation et développement rural qui m’ont permis de maintenir des ponts entre ces différentes activités ; boucles entre re-conception de novo de systèmes et recherche incrémentielle sur les itinéraires techniques; boucles entre échelles de travail (de l’électron à la région, avec la parcelle comme centre de gravité) en relation avec la diversité des disciplines que j’ai mobilisées en tant qu’agronome système généraliste.

J’ai encadré 5 doctant.e.s, une post-doctorante, 12 étudiant.e.s de niveau Master et 10 étudiant.e.s de niveau Licence pro-DUT-IUT. J’ai publié 23 articles scientifiques (avec facteur d’impact), 6 articles dans des journaux sans facteur d’impact, 6 ouvrages et 11 chapitres d’ouvrage et 50 publications dans des actes de colloques et congrès nationaux et internationaux à comité de lecture.

J’ai structuré ma carrière autour de deux grands changements de paradigmes. Le premier, maintenant "classique", a été initié dès mon intégration à mon équipe de recherche en 1989: celui du passage d’une agriculture conventionnelle qui repose largement sur les intrants externes, à des pratiques agroécologiques, en particulier les systèmes en Semis direct sur Couverture Végétale permanente (SCV) qui reposent sur la mobilisation des processus écologiques pour remplir des services écosystémiques. Le deuxième changement de paradigme que je propose est de développer une approche prophylactique de la santé des plantes basée sur un modèle conceptuel de fonctionnement des écosystèmes reposant sur le rôle fondamental du maintien dynamique de l’homéostasie Eh-pH à diverses échelles d’organisation, modèle que j’ai développé personnellement.

Pour essayer de rendre compte de la non-linéarité de mes activités, je présente mon bilan sous la forme d’une matrice constituée de quatre grands axes, chacun décliné en trois domaines de production qui caractérisent la diversité de mes travaux: i) production scientifique (la théorie) : compréhension des processus et modèles conceptuels ; ii) production technique : co-conception et diffusion de systèmes de culture innovants (la mise en pratique) ; iii) production méthodologique (l’adaptation des méthodes).

Le premier axe structurant est l’utilisation de la variabilité spatio-temporelle comme source d’information pour des diagnostics agronomiques multi-échelles, spatialisés et dynamiques, et la structuration des dispositifs de recherche, de formation et de changement d’échelle. Le deuxième axe est la co-conception de systèmes de culture durables, adaptés localement sur la base de grands principes de fonctionnement des systèmes. Cet axe inclut le développement de modèles conceptuels de fonctionnement des agroécosystèmes cultivés et d’indicateurs pertinents pour la compréhension des processus et le pilotage des systèmes de culture. Le troisième axe concerne les leviers d’amélioration de l’impact de la recherche sur le développement rural, via des changements d’échelle et des formations.

Enfin, le dernier axe est celui que je développe depuis une douzaine d’années, qui consiste à reconnaître l’importance fondamentale des réactions d’oxydo-réduction en interaction avec les réactions acido-basiques, et ainsi mettre en évidence le rôle central du maintien dynamique des équilibres Eh-pH pour la santé des agroécosystèmes. Cette approche très originale, novatrice et unificatrice, ouvre des perspectives extrêmement intéressantes tant pour la compréhension des processus et interactions en jeu que pour la conception de systèmes et de pratiques agroécologiques.

Mon projet scientifique pour les dix prochaines années vise à utiliser les connaissances développées sur les processus "redox" en jeu dans le fonctionnement des systèmes sols/plantes/microorganismes/ macrofaune, pour améliorer la conception des systèmes SCV. Il s’agit de reconcevoir les systèmes de culture et de piloter les pratiques pour une protection agroécologique des cultures par maintien dynamique des équilibres Eh-pH dans ces systèmes, et pour cela mettre en avant le rôle déterminant de la photosynthèse dans la santé des écosystèmes. Je me pose ainsi trois grandes questions :

1. "Comment accélérer et optimiser la période de transition des systèmes conventionnels (souvent sur sols déstructurés, avec des conditions oxydantes pour les plantes) aux systèmes SCV (visant à restructurer et régénérer les sols) ?"

2. "Comment combiner des leviers pour maintenir l’homéostasie Eh-pH des plantes, en particulier durant cette période de transition ?"

3."Quels impacts de ces modes de protection agroécologique des cultures sur la qualité des produits ?"

Pour y répondre, je vais pouvoir m’appuyer sur un réseau « Redox » développé ces dernières années, regroupant une grande diversité d’acteurs : des collègues du CIRAD (de mon UR et d’autres) et d’autres organismes de recherche (CNRS, INRAe, IRD), des organismes de formation (Ver de Terre Production etc.), des sociétés privées (Senseen etc.), des associations de promotion de l’agriculture de conservation (PADV etc.), des chambres d’agriculture, sans oublier de nombreux agriculteurs engagés dans cette démarche et pour qui cette approche « redox » apporte un nouveau regard, leur permettant de progresser dans la mise en œuvre de leurs systèmes et de leurs pratiques. 

Published: 16/12/2022